Pourquoi il faut lire "Extrêmement fort et incroyablement près" (plutot que d'aller voir le film)

 
Alors que le film très attendu de Stephen Daldry –Extrêmement fort et incroyablement près – vient de sortir sur nos écrans, on se rend compte qu’adapter un chef d’œuvre de la littérature au cinéma n’est pas chose facile.
Le roman post 11-septembre de Jonathan Safran Foer est un incontournable de la littérature contemporaine américaine.  Un récit poignant et passionnant à travers un New-York traumatisé qui essaye de se reconstruire.
Il serait dommage de passer à coté d’un tel plaisir de lecture. Alors voici pourquoi il faut lire Extrêmement fort et incroyablement près plutôt que d’aller voir le film.
 

1. Parce que l’auteur est un futur grand de la littérature américaine

Jonathan Safran Foer est mon coup de cœur littéraire absolu depuis quelques années.  Jeune trentenaire New-yorkais, on lui doit notamment son premier livre Tout est illuminé, l’histoire d’un jeune juif américain qui voyage en Ukraine pour retrouver la trace de son grand père, victime de la Shoah. Ça peut paraître plombant comme ça, mais ce livre est un chef d’œuvre d’imagination et d’humour. Complètement décalé, c’est certainement un de mes livres préférés.
Il a publié en 2009 un essai sur la nourriture Faut il manger les animaux ? Absolument passionnant. Dans ce livre, il utilise son talent de romancier et son humour pour dénoncer l’élevage industriel et la malbouffe. Que vous soyez intéressé par le sujet ou non, je vous le conseille, ça se lit comme un roman et on apprend beaucoup de choses.

Jonathan Safran Foer

2. Parce que le récit est passionnant

Le second roman de Foer Extrêmement fort et incroyablement près est une vraie réussite.  C’est à la fois un témoignage sur les conséquences et le traumatisme du 11 septembre mais aussi une histoire passionnante, un vrai jeu de piste à travers New-York dans lequel on tombe complètement.
Le livre raconte l’histoire d’Oskar, un petit garçon de 9 ans dont le père est mort dans les attentats du 11 septembre.  En pleine période de deuil, il retrouve une clé dans les affaires de son père.  Il se met en tête que celle ci a été laissée intentionnellement par son père et qu’il s’agit d’une énigme qu’il décide de découvrir. Il part alors dans une enquête à travers la ville, ponctuée d’indices et de rencontres.  Il s’agit d’une sorte de conte, avec des épreuves à surmonter par Oskar pour percer le mystère laissé par son père.
Foer a réussi à écrire un livre drôle, palpitant, pleins de rebondissements mais jamais de pathos, alors que finalement, le sujet de fond est la dépression d’un enfant qui ne se remet pas de la mort de son père.

Tu as raison de te cacher, Petit Oskar…

3. Parce que c’est un livre graphique et ludique

L’originalité du livre est sa grande liberté de présentation. En effet, il mêle texte et images, photos, lettres, cartes…  Parfois des pages vides, ou alors avec un mot. L’auteur joue aussi avec l’aspect graphique et esthétique qui prend complétement part à l’histoire
Ce parti pris lui a souvent été reproché par la critique, pensant que le fait d’intégrer des dessins et photos rendaient le livre superficiel. Voici la réponse de l’auteur à cette remarque : «Si je vous dis: « le 11 Septembre », quelle est votre pensée première ? Des images, non ? Eh bien voilà pourquoi ce livre en comporte. Je ne cherche pas à faire un roman expérimental mais à permettre au lecteur de ressentir des émotions qui ne soient pas tièdes. Et pour cela, j’ai besoin de mettre sur le papier tout ce qui me passe par la tête. On a assez dit que le 11 Septembre ne pouvait être décrit en mots. D’accord. Donc, décrivons l’indescriptible avec autre chose que des mots.»

4. Parce que dans le livre, la mère n’est pas jouée par Sandra Bullock

Je ne pense pas qu’engager l’héroïne de Miss Détective ou Speed dans un film soit un gage de qualité…  A coté, avoir pris Tom Hanks dans le rôle du père apparaît presque comme une bonne idée. Ce casting sent le film hollywoodien et l’argent à plein nez, dommage.

Non Sandra, porter des lunettes ne suffit pas pour devenir une actrice crédible.

5. Parce que le livre est chef d’œuvre, alors que le film, pas

J’ai vu le film ce WE, malgré les critiques plutôt mauvaises. Je savais que j’allais être déçue puisque j’avais adoré le livre. Ca n’a pas loupé. Il s’agit d’un mélo guimauve et larmoyant, un blockbuster tartignole à l’américaine.  A mon goût, ce livre méritait tellement mieux que ça.
La critique de l’Express exprime très bien mon ressenti : « On rangera doucement ce film sur l’étagère des ratages sans rien dire à personne -ou presque. Stephen Daldry est un cinéaste sensible qui ne fait habituellement pas dans le gnangnan, en témoignent Billy Elliot, The Hours et The Reader, œuvres inspirées et de belle facture. Qu’est-ce donc alors que ce machin au titre étrange ? […]. Plus de deux heures au compteur. Pour un film qui semble avoir dix ans de retard et qui reste sec là où il aurait dû émouvoir. »
Le mot est lâché : gnangnan. Quel dommage…  Alors pour conclure, oubliez vite le film et lisez le Extrêmement fort et incroyablement près, vous ne serez pas déçus !

Je serai ton meilleur ami pendant plusieurs heures et tu ne pourra plus me lâcher jusqu’à la dernière page